Les aveugles entendent vraiment mieux
Nous avons tous entendu dire que les aveugles entendent mieux que les voyants – possiblement pour compenser leur incapacitĂ© Ă voir. Or, des chercheurs de l’Institut neurologique de MontrĂ©al (INM), de l’UniversitĂ© ÎŰÎ۲ÝÝ®ĘÓƵ et de l’UniversitĂ© de MontrĂ©al ont dĂ©montrĂ© que les aveugles entendent vraiment les notes avec plus de prĂ©cision, mais seulement s’ils souffrent de cĂ©citĂ© depuis un très jeune âge. Les fruits de leurs recherches, Pitch discrimination in the Early Blind, ont Ă©tĂ© publiĂ©s dans la revue Nature (15 juillet).
Dr Robert Zatorre, spĂ©cialiste de la cognition Ă l’INM de l’UniversitĂ© ÎŰÎ۲ÝÝ®ĘÓƵ et membre de l’équipe de recherche, a expliquĂ© que l’idĂ©e selon laquelle la cĂ©citĂ© peut aider au dĂ©veloppement musical n’est pas nouvelle. Cependant, les Ă©tudes antĂ©rieures ne rĂ©ussissaient pas Ă quantifier cette notion, possiblement parce qu’elles ne tenaient pas compte de l’âge auquel les gens devenaient aveugles.
Dans la prĂ©sente Ă©tude, les chercheurs de ÎŰÎ۲ÝÝ®ĘÓƵ et de l’UniversitĂ© de MontrĂ©al ont testĂ© des gens de 3 catĂ©gories : des voyants, des « aveugles prĂ©coces » (aveugles de naissance ou ayant perdu la vue avant l’âge de deux ans), et des « aveugles tardifs » (gens ayant perdu la vue Ă un âge plus avancĂ©). Les tests Ă©prouvaient la capacitĂ© de chaque groupe Ă reconnaĂ®tre des changements de hauteur d’un son. Le sujet Ă©coutait deux tons et devait dĂ©cider si le deuxième Ă©tait plus haut ou plus bas que le premier.
Les « aveugles précoces » ont surclassé les autres groupes dans chaque tâche, continuant à distinguer avec exactitude les notes à mesure que leur hauteur tonale se rapprochait ou s’éloignait. Toutefois, on n’a constaté aucune différence notable dans les résultats obtenus par les sujets voyants et les aveugles tardifs.
Ces résultats révèlent la capacité du cerveau à se réorganiser tôt dans la vie. À la naissance, les centres cérébraux pour la vision, l’ouïe et les autres sens sont tous reliés. Pascal Belin, de l’Université de Montréal et chef de l’étude, estime que ces connexions, qui sont peu à peu éliminées pendant le développement normal, pourraient être préservées et utilisées par les aveugles précoces pour traiter des sons.