Quatre semaines pour mieux affronter une opération
Une prĂ©adaptation de quatre semaines seulementĚý– c’est-Ă -dire une prĂ©paration prĂ©opĂ©ratoireĚý– pourrait suffire Ă la remise en forme de patients atteints de cancer en prĂ©vision de leur opĂ©ration. C’est ce qui ressort d’une Ă©tude rĂ©cente menĂ©e Ă MontrĂ©al, par une Ă©quipe dirigĂ©e par l’UniversitĂ©ĚýÎŰÎ۲ÝÝ®ĘÓƵ, chez près de 120Ěýpatients atteints d’un cancer colorectal. Et selon des travaux antĂ©rieurs de ces mĂŞmes chercheurs, la convalescence pourrait ĂŞtre plus rapide encore si l’intervention se dĂ©roule comme prĂ©vu.
«ĚýOn ignore la quantitĂ© exacte d’exercice Ă prescrire au patient en attente d’une opĂ©rationĚý», souligne CelenaĚýScheede-Bergdahl, kinĂ©siologue qui enseigne Ă l’UniversitĂ©ĚýÎŰÎ۲ÝÝ®ĘÓƵ et figure au nombre des auteurs de l’étude sur le programme de prĂ©adaptation de quatre semaines. «ĚýMais nous espĂ©rons qu’en adjoignant un kinĂ©siologue aux oncologues et autres spĂ©cialistes de l’équipe soignante, et en misant sur la prĂ©adaptation plutĂ´t que sur la rĂ©adaptation, on aidera le patient Ă se rĂ©tablir et Ă reprendre ses occupations plus rapidement.Ěý»
VoilĂ une bonne nouvelle pour les personnes de plus de 60Ěýans, qui constituent la majoritĂ© des patients atteints d’un cancer colorectal. Selon les chiffres les plus rĂ©cents de l’Organisation mondiale de la SantĂ©, ce cancer arrive au troisième rang des cancers les plus frĂ©quents dans le monde chez les femmes, et au deuxième chez les hommes. Bien que la mortalitĂ© associĂ©e Ă ce cancer soit Ă la baisse dans le monde, la chirurgie abdominale majeure qu’il nĂ©cessite est suivie d’une convalescence souvent longue et pĂ©nible, en partie Ă cause de la mauvaise condition physique du patient Ă l’entrĂ©e de la salle d’opĂ©ration. En règle gĂ©nĂ©rale, six mois après l’intervention, seul un patient sur cinq a repris la totalitĂ© de ses activitĂ©s.
C’est ici qu’entre en scène la prĂ©adaptationĚý: on prĂ©pare le patient en amont de l’intervention plutĂ´t que de simplement l’aider Ă se rĂ©tablir en aval.
Comme un athlète
VoilĂ quatre ans que MmeĚýScheede-Bergdahl accompagne des personnes âgĂ©es atteintes d’un cancer; elle sait Ă quel point il est difficile de commencer Ă faire de l’exercice lorsqu’on vient de recevoir un diagnostic de cancer.
«ĚýLe patient qui vient d’apprendre qu’il a le cancer est gĂ©nĂ©ralement anxieux, et l’exercice est le cadet de ses soucis. Pourtant, l’activitĂ© physique peut changer la donne complètement. Lors d’une opĂ©ration, l’organisme subit un Ă©norme stress physique sur une très courte pĂ©riode. Aussi, depuis une dizaine d’annĂ©es, certains mĂ©decins et kinĂ©siologues soumettent leurs patients Ă une prĂ©paration digne de l’entraĂ®nement d’un athlète avant une compĂ©tition. Les patients sont soumis Ă un programme d’exercice personnalisĂ© qui, en sollicitant l’organisme, lui permet de s’adapter avant l’opĂ©ration. Et nous constatons que ces patients se rĂ©tablissent mieux.Ěý»
Pour une meilleure santé postopératoire
Pour tester leur programme de prĂ©adaptation de quatre semainesĚý– exercice, techniques de relaxation et supplĂ©ments de protĂ©ines de lactosĂ©rumĚý– les chercheurs ont rĂ©parti de manière alĂ©atoire 116Ěýpatients atteints d’un cancer colorectal en deux groupesĚý: un groupe tĂ©moin et un groupe soumis Ă une prĂ©adaptation. Après quatre semaines, 70Ěýpour cent des patients en prĂ©adaptation consacraient deux fois plus d’heures Ă l’exercice et avaient ainsi augmentĂ© la distance parcourue en six minutes de près de 24Ěýmètres en moyenne (une variation de 20Ěýmètres est considĂ©rĂ©e comme cliniquement significative). Dans le groupe tĂ©moin, on a assistĂ© Ă un tout autre scĂ©nario, Ă savoir une tendance vers une plus grande sĂ©dentaritĂ© au cours des quatre semaines Ă©coulĂ©es entre le diagnostic et l’intervention ainsi qu’une diminution significative de la distance parcourue en six minutes. (Après l’intervention, on a proposĂ© aux tĂ©moins un programme de rĂ©adaptation semblable au programme de l’étude.)
« Jadis, les mĂ©decins conseillaient Ă leurs patients de s’aliter avant l’opĂ©ration, histoire de prendre des forces avant le jourĚýJ. Ă€ vrai dire, cette modalitĂ© risque d’entraĂ®ner plus de complications. Le patient perdra de la masse musculaire, sera plus fatiguĂ© et mettra plus de temps Ă se rĂ©tablir après l’intervention. Sans compter que cette convalescence plus longue aura pour effet de retarder la chimiothĂ©rapie ou la radiothĂ©rapie », prĂ©cise CelenaĚýScheede-Bergdahl.
Un concept qui gagne en popularité dans le monde
La prĂ©adaptation suscite un intĂ©rĂŞt grandissant chez les soignants qui travaillent en oncologie. Le DrĚýFrancoĚýCarli, anesthĂ©siste qui a instaurĂ© ce concept au Centre universitaire de santĂ© ÎŰÎ۲ÝÝ®ĘÓƵ, est allĂ© Ă la rencontre de nombreux professionnels de la santĂ© aux quatre coins du monde. « À l’heure actuelle, la prĂ©adaptation a la cote. Grâce Ă la collaboration de divers spĂ©cialistes, le patient arrive en salle d’opĂ©ration fin prĂŞt Ă affronter l’intervention, la convalescence et les traitements qui suivront. »
L’article « Four-week prehabilitation program is sufficient to modify exercise behaviors and improve preoperative functional walking capacity in patients with colorectal cancer », par BrianĚýChen et coll., a Ă©tĂ© publiĂ© dans Supportive Care in Cancer. DoiĚý: 10.1007/s00520-016-3379-8 .
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